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Le microbiote intestinal : des bactéries au service de notre santé


Alors que nous avons passé les dernières années à nous laver les mains, il peut être difficile de concevoir que certains micro-organismes qui se retrouvent dans notre corps peuvent, quant à eux, être bénéfiques pour notre santé… pourtant, c’est bien le cas ! Voyons comment ceux-ci peuvent interagir avec nous !




Bien qu’elles puissent nous inspirer très peu confiance au premier abord, les bactéries cohabitent avec nous au quotidien. Certains penseront les retrouver uniquement dans des endroits malpropres, comme la poignée de porte de la salle de bain, mais ils seront surpris d’apprendre que notre corps accueille un nombre impressionnant de bactéries que l’on nomme le « microbiote ». En effet, plusieurs bactéries se retrouvent sur notre peau, dans notre bouche et tout particulièrement, dans l’intestin, que l’on nomme le microbiote intestinal.


Il peut sembler étonnant que des bactéries vivent en permanence avec nous sans pour autant nous rendre malades. Bien qu’il soit vrai que certaines bactéries soient nocives pour nous, d’autres sont, quant à elles, de véritables alliées pour nous garder en bonne santé : la clé réside dans l’équilibre ! En espérant que les prochaines lignes sauront vous éclairer sur cet impressionnant système.



Les rôles des bactéries présentes dans l'intestin

Jusqu’à présent, le rôle le mieux défini pour les bactéries intestinales est leur contribution à la digestion des aliments. Ainsi, lorsque l’on ingère des aliments, les nutriments qui les composent (c.-à-d. protéines, lipides et glucides) vont d’abord être libérés par notre machinerie « moléculaire » dans la bouche et l’estomac. Par la suite, ils se dirigent vers l’intestin où la majorité des bactéries attendent patiemment afin d’effectuer leur travail. Elles vont pouvoir dégrader les nutriments restants, afin de nous permettre de les absorber, d’en extraire de l’énergie ou alors de produire diverses molécules qui ont de multiples rôles dans notre corps.


En effet, dans le processus de digestion de ces nutriments par les bactéries, ces dernières sont en mesure de produire certaines molécules qui agissent à titre de messagères dans notre corps. Notamment, il y a les acides gras à chaîne courte, produits à partir des fibres, qui peuvent par exemple, interpeller le pancréas pour contrôler le taux de sucre dans le sang (1) ou réduire le cholestérol sanguin (2). Les bactéries sont aussi responsables de la production de la précieuse vitamine K qui est nécessaire à la coagulation sanguine et permet ainsi de diminuer les saignements lors d’une blessure.


Les bactéries sont aussi impliquées dans le bon fonctionnement de notre système immunitaire. Elles nous aident à combattre les bactéries pathogènes, c’est-à-dire celles qui ont le potentiel de nous rendre malades. Elles ne sont pas infaillibles, mais elles peuvent néanmoins nous rendre moins susceptibles aux envahisseurs potentiels, dont Escherichia coli (E. coli) et Clostridium difficile (C. difficile). Comment procèdent-elles pour nous défendre ? La simple présence des bactéries favorables à la santé empêche les bactéries potentiellement nocives provenant de notre environnement de pouvoir venir s’y installer : elles sont très territoriales !


Le microbiote intestinal est aussi intimement lié au cerveau ainsi qu’à la santé mentale, notamment à l’état d’anxiété et de dépression (3). Pour démontrer cette relation, une technique quelque peu surprenante a été expérimentée chez la souris et, plus récemment, chez l’humain : la transplantation fécale. Il s’agit de transférer le microbiote intestinal d’un individu en santé vers un receveur, un individu avec un état d’anxiété et/ou de dépression. À la suite de cette procédure, on remarque une amélioration de l’état psychologique du receveur, mais uniquement pour une période de quelques mois. Cette étude confirme l’implication du microbiote intestinal dans la santé mentale, mais le rôle exact demeure incertain. C’est également avec cette technique que l’on a pu démontrer l’implication du microbiote intestinal dans l’obésité et ses diverses complications, telles que le diabète de type 2 (4). Il est à noter que la transplantation fécale n’est toutefois pas utilisée comme traitement à ce jour.


Finalement, il est plutôt fascinant de constater que la composition en bactéries de l’intestin a une influence sur plusieurs aspects du fonctionnement de notre corps; et c’est ce qui rend l’étude de ce dernier très pertinent.



La variabilité du microbiote intestinal Les variations dans le microbiote intestinal sont aussi nombreuses que le nombre d’individus sur Terre… ça fait beaucoup ! Cependant, il est possible d’identifier des similarités entre certains groupes de personnes. En effet, plusieurs conditions ont été identifiées comme des éléments pouvant façonner le microbiote intestinal comme l’alimentation évidemment, certaines conditions de santé (p. ex. obésité, diabète de type 2), l’âge de la personne, son environnement (p. ex. vivre en ville ou en campagne), la prise de médicaments, etc. Avec tant de facteurs qui modifient la composition de notre microbiote, vous pouvez maintenant comprendre la grande complexité d’étudier ce système !

[…] plusieurs conditions ont été identifiées comme des éléments pouvant façonner le microbiote intestinal comme l’alimentation évidemment, certaines conditions de santé (p. ex. obésité, diabète de type 2), l’âge de la personne, son environnement (p. ex. vivre en ville ou en campagne), la prise de médicaments, etc.


Comment modifier les bactéries présentes dans l'intestin par l'alimentation ?

Il faut savoir qu’à ce jour, nous ne pouvons pas déterminer une seule ou même plusieurs combinaisons de bactéries précises qui définissent un « bon » microbiote intestinal. Bien que de nombreuses études s’y intéressent, il n’est pas simple de modifier de façon spécifique notre microbiote afin de prévenir ou guérir une maladie. Par contre, quelques aliments clés ont été identifiés comme favorables à celui-ci.


En effet, pour se nourrir, les bactéries utilisent la même chose que nous, c’est-à-dire des nutriments. Chaque type de bactéries a ses préférences alimentaires. Les fibres, qui sont présentes dans les aliments comme les fruits, légumes, légumineuses et produits à grains entiers, sont la nourriture la plus appréciée de plusieurs bactéries bénéfiques présentes dans l’intestin (5). Il faut donc favoriser le plus possible ces aliments, ce qui, de toute façon, est en accord avec les recommandations du Guide alimentaire canadien.


Un autre des aspects importants pour la santé du microbiote intestinal est la diversité des bactéries présentes; et pour favoriser celle-ci, il faut s’assurer d’avoir une alimentation variée avec le moins d’aliments transformés possible. Rien de nouveau ici : aucun aliment miracle à lui seul ne peut vous assurer la santé !


Chaque type de bactéries a ses préférences alimentaires. Les fibres, qui sont présentes dans les aliments comme les fruits, légumes, légumineuses et produits à grains entiers, sont la nourriture la plus appréciée de plusieurs bactéries bénéfiques présentes dans l’intestin (5).


Les probiotiques peuvent-ils bonifier notre microbiote ?

Les probiotiques sont considérés comme des micro-organismes vivants qui, lorsqu’ils sont administrés en quantité adéquate, ont un effet bénéfique sur la santé de l’hôte (6). Les probiotiques peuvent être vendus notamment sous forme de capsule ou liquide. La consommation de ces bactéries vise à modifier le microbiote intestinal en le bonifiant de bactéries ayant un effet positif sur la santé. Même si le rôle des probiotiques dans la santé globale n’est pas encore clair, il existe des indications précises pour lesquelles les probiotiques se sont avérés utiles.


D’une part, on peut les utiliser pour aider à prévenir la diarrhée du voyageur, la fameuse

« tourista », en les prenant quelques jours avant un voyage et en poursuivant quelques jours après (7). D’autre part, ils peuvent également être utiles lors de la prise d’antibiotiques où la diarrhée est un effet secondaire très fréquent (8). Pourquoi ? Les antibiotiques sont utilisés pour tuer les bactéries qui nous rendent malades, mais ceux-ci peuvent aussi malheureusement avoir un impact sur les bactéries bénéfiques présentes dans l’intestin. Cela laisse le champ libre à la prolifération des mauvaises bactéries. En d’autres mots, on peut dire que les antibiotiques sont un véritable choc pour l’équilibre du microbiote intestinal et que les probiotiques aident ainsi à protéger cet équilibre. Mais attention, lorsqu’on consomme des probiotiques, les bactéries ingérées seront des touristes passagères de l’intestin et ne protégeront pas le microbiote à long terme.


Certains aliments contiennent eux aussi des microorganismes vivants, mais en concentrations très variables comme dans certains aliments fermentés (p. ex. kombucha, tempeh, kéfir). Considérant que peu d’études de qualité ont été effectuées chez l’humain avec les aliments fermentés et que leur teneur en micro-organismes vivants est très variable (9,10) , il est préférable de se tourner vers les probiotiques vivants, à boire ou en capsule, si l’on souhaite obtenir l’effet probiotique préventif escompté.



Ce qu'il faut retenir du microbiote intestinal...

Le microbiote intestinal possède un fort potentiel pour devenir la cible préventive ou thérapeutique de nombreuses maladies. À ce jour, le mot « potentiel » demeure toutefois important vu la publicité parfois trompeuse et sans preuve faite à son égard. Malgré plusieurs liens plausibles entre la santé et le microbiote intestinal, la science doit maintenant faire son travail afin de fournir des preuves solides quant au rôle du microbiote intestinal dans la prévention et/ou le traitement de maladies. Restons donc à l’affût !



Rédigé par :

Sophie Castonguay-Paradis, M.Sc., Dt.P. en collaboration avec Alain Veilleux, Ph.D.

Centre Nutrition, santé et société (NUTRISS) de l’Institut sur la nutrition et les aliments fonctionnels (INAF), Université Laval

École de nutrition, Université Laval

Chaire d'excellence en recherche du Canada sur l'axe microbiome-endocannabinoïdome dans la santé métabolique, Université Laval


Références :

1. He J, Zhang P, Shen L, Niu L, Tan Y, Chen L, Zhao Y, Bai L, Hao X, Li X, et al. Short-Chain icrFatty Acids and Their Association with Signalling Pathways in Inflammation, Glucose and Lipid Metabolism. IJMS 2020;21:6356.

2. den Besten G, van Eunen K, Groen AK, Venema K, Reijngoud D-J, Bakker BM. The role of short-chain fatty acids in the interplay between diet, gut microbiota, and host energy metabolism. J Lipid Res 2013;54:2325–40.

3. Socała K, Doboszewska U, Szopa A, Serefko A, Włodarczyk M, Zielińska A, Poleszak E, Fichna J, Wlaź P. The role of microbiota-gut-brain axis in neuropsychiatric and neurological disorders. Pharmacological Research 2021;172:105840.

4. Aron-Wisnewsky J, Clément K, Nieuwdorp M. Fecal Microbiota Transplantation: a Future Therapeutic Option for Obesity/Diabetes? Curr Diab Rep 2019;19:51.

5. Makki K, Deehan EC, Walter J, Bäckhed F. The Impact of Dietary Fiber on Gut Microbiota in Host Health and Disease. Cell Host & Microbe 2018;23:705–15.

6. Hill C, Guarner F, Reid G, Gibson GR, Merenstein DJ, Pot B, Morelli L, Canani RB, Flint HJ, Salminen S, et al. The International Scientific Association for Probiotics and Prebiotics consensus statement on the scope and appropriate use of the term probiotic. Nat Rev Gastroenterol Hepatol 2014;11:506–14.

7. Sniffen JC, McFarland LV, Evans CT, Goldstein EJC. Choosing an appropriate probiotic product for your patient: An evidence-based practical guide. Lobo LA, editor. PLoS ONE 2018;13:e0209205.

8. Newberry SJ. Probiotics for the Prevention and Treatment of Antibiotic-Associated Diarrhea: A Systematic Review and Meta-analysis. JAMA 2012;307:1959.

9. Dimidi E, Cox S, Rossi M, Whelan K. Fermented Foods: Definitions and Characteristics, Impact on the Gut Microbiota and Effects on Gastrointestinal Health and Disease. Nutrients 2019;11:1806.

10. Stiemsma LT, Nakamura RE, Nguyen JG, Michels KB. Does Consumption of Fermented Foods Modify the Human Gut Microbiota? The Journal of Nutrition 2020;150:1680–92.


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